Nous n’avons jamais vécu des temps si incertains. Aussi loin qu’on s’en souvienne, quelque chose s’est clairement décalée dans notre monde. Pourtant, jusqu’à l’émergence de la pandémie du Coronavirus, beaucoup pouvaient encore feindre le déni, regarder ailleurs en évitant bien ce qui se présentait sous leurs yeux avec de plus en plus d’insistance. Beaucoup d’entre nous continuaient à mener une vie normale, prétendant que tout allait bien, merci beaucoup, comme s’ils jouaient au jeu d’enfant « on dirait que tu serais… ». Et alors, toute personne qui pensait différemment n’était qualifiée de cinglée, de théoricienne du complot, totalement paranoïaque ou encore marginalisée de toute sorte de façons.
En d’autres termes, notre monde est déséquilibré et nous avons ignoré ses messages, qui pourtant, tel un rêve récurrent, certifiaient que les messages s’amplifieraient et deviendraient plus difficiles à ignorer au fur et à mesure que nous nous rapprocherions du niveau de catastrophe. Et comme si on avait fini par lever le voile, le Coronavirus est apparu, dans des conditions incertaines, nous rappelant la finesse et la fragilité des murs bâtis entre notre monde si bien ordonné et prévisible et le chaos total. Nos manières de vivre inconscientes, tout comme nos illusions, ne sont plus viables et se désagrègent à une vitesse vertigineuse. Le mot « catastrophe » en Grec signifie « tournant ». Nous avons atteint un point de transformation nécessaire pour l’évolution de notre espèce.
Un spectre invisible dans le champ, le Coronavirus crée des ravages dans le monde, perturbant le commerce comme d’habitude, et se propage dans notre monde extérieur tout autant qu’à l’intérieur dans notre psyché, et ce, à travers le globe. Le Coronavirus peut être envisagé comme les plaies d’Égypte d’un temps moderne. C’est une révélation vivante qui se tue à nous montrer qui nous sommes et la place que nous occupons dans l’univers. Ce qui nous est révélé est une connaissance cruciale et importante. Notre survie dépend de la réception de ces messages.
En laissant libre cours à notre imagination, prenons un exemple vraiment radical : une invasion de méchants extra-terrestres venus de l’espace pour arracher l’humanité de son envoûtement collectif qui nous fait croire que nous sommes séparés les uns des autres, tout en nous inspirant à joindre nos forces (y compris se joindre à celles de nos adversaires) afin d’être capables de vaincre une menace à notre existence collective, à notre survie. C’est un concept archétypal que de croire que des forces qui feraient invariablement le mal finiraient par accélérer l’avènement d’un bien plus grand. Sans prendre en compte ses origines, le Coronavirus pourrait être perçu comme étant la forme romancée que les forces de maladie et de destruction prendraient à leur insu pour accomplir leur fonction qui consiste à aider notre espèce à reconnaître son interconnexion entre semblables et toute forme de vie.
Nous dépendons tous véritablement les uns des autres tants pour notre bien-être que pour notre survie. Si nous considérons le Coronavirus dans une échelle de symboles imaginaires portant ses messages, il pourrait alors nous révéler qu’au lieu de se battre les uns contre les autres, nous pourrions admettre la vérité irréfutable que nous sommes tous du même bord. Nous pourrions nous unir pour former un tout pour l’emporter sur notre ennemi commun, qui a un certain niveau est le Coronavirus, mais à un niveau plus élevé est notre ignorance, l’ignorance de notre connexion les uns avec les autres. En d’autres termes, le Coronavirus est la médecine qui peut nous aider à tourner la page et à réaliser que la tâche la plus vitale et la plus urgente pour l’humanité est de voir à travers ce qu’Einstein appelait la « désillusion optique de la conscience » ou l’illusion de séparation.
Un des plus grands symptômes du Coronavirus est sa capacité à générer la peur – qui est connue pour affaiblir le système immunitaire, permettant de fait, au virus de se propager plus rapidement. Lorsque la peur est mobilisée de façon collective, en raison de sa nature psychiquement contagieuse, elle revêt une existence apparemment autonome et indépendante, nourrissant la panique des masses qui peut rapidement se transformer en une psychose collective. Voir à travers l’illusion du moi séparé revient également à confisquer le pouvoir que la peur a sur nous (tout autant qu’elle nous renforce), car l’expérience de la séparation et de la peur (de « l’autre ») jaillissent ensemble, se renforçant réciproquement l’une avec l’autre. La véritable compassion (qui fortifie le système immunitaire) est le résultat de cette réalisation.
Il est d’une importance significative de constater, toutefois, que le Coronavirus est un phénomène quantique car il contient à la fois en lui-même, le poison porteur de mort et sa propre médecine. Son propre vaccin est encodé dans le virus: en tant que cellules connectée et interdépendante d’un organisme vivant plus grand, chacun de nous doit réaliser avec le Coronavirus que nous pouvons coopérer ensemble en synergie pour combattre et vaincre son invasion. Bien qu’il soit en perpétuelle mutation, le Coronavirus nous force, le moment venu, à muter – à élargir notre conscience – ou autre ! En tant que tel, le Coronavirus est un catalyseur puissant pour l’évolution de l’humanité. Comment cette pandémie se manifestera au final dépend de nous – dans le pur style quantique, potentiellement – selon comment nous reconnaîtrons ou pas ce qu’il nous révèle de nous-mêmes.
Nous n’avons pas encore été clairement capables, en tant qu’espèce, de voir suffisamment à travers l’insoluble et persistante illusion de la séparation du moi et de reconnaître notre interdépendance collective. Si on le considère comme un phénomène imaginaire, nous avons collectivement imaginé une pandémie mondiale, une plaie d’Egypte moderne, une invasion par un microbe apparemment étranger, dont personne ne serait immunisée et qui contribuerait à dissiper l’illusion primaire de séparation du moi et nous aiderait à affronter la réalité de qui nous sommes dans cette conspiration plus vaste. Comme le Jung le rappelle, une « nouvelle voie » doit être découverte – cette voie qu’il comparait à une veine inconnue qui vivrait dans le corps politique plus grand de l’humanité et qui nous connecte tous. Nous serions complices en créant une tragédie aux proportions historiques si nous manquions cette opportunité dorée et cachée qui est encodée dans la pandémie du Coronavirus. Ce virus est destiné à nous aider à réaliser quelle relations nous avons les avec les autres, en tant que famille humaine, nous conduisant à nous rassembler pour ne faire qu’un. C’est le cadeau contenu à l’intérieur de cette maladie qui nous aide non seulement à guérir la maladie, mais contribue aussi à nous soigner nous-mêmes.
Paul Lévy